À propos du projet

« Flama en el agua » 

Flama en el aguaest le journal de Kathy-Alexandra lors de la fronde sociale au Chili, vivant sa violence à plus de 8000km de Santiago. L’ère numérique permet aux réalités de la résistance chilienne de faire écho dans les réseaux sociaux, écho qui s’amplifie dans le cœur des Chiliens et alliés autour du monde. Munie de son cellulaire comme ses compatriotes au Chili, Kathy-Alexandra s’empare des rues de Montréal pour prêter main-forte à Santiago. 

Le 18 octobre 2019, ce soir-là chez mes parents à La Prairie, ce que j'allais voir à la télé allait marquer un nouveau chapitre dans ma vie. Ce soir-là, assise sur le sofa avec mon père, dans le sous-sol froid et silencieux, mon père me dit tout à coup: «Allume la télé voir! À ce qui parait, c'est la merde au Chili!» J'allume la télé, déjà programmée sur un poste chilien. Ce que j'ai vu dans cet écran plat n'était pas un documentaire sur le coup d'état de 1973. Le 18 octobre 2019 je vis en temps réel l'armée dans les rues de Santiago. Comme si à cet instant l'histoire de mon père devenait maintenant aussi la mienne. 

Les manifestants, les étudiants, auraient déclenché une révolte sociale. Ce sont eux les responsables, disent-ils. Ce sont eux les violents, disent-ils ... Toque de queda. Les médias, comme en temps de dictature, manipulent les informations et incriminent le peuple. Le président nous dit que nous sommes en guerre. En guerre. On nous dit que tout va bien, l'armée est là.   

La différence entre 1973 et aujourd'hui c'est que le peuple n'a plus besoin des médias. La différence c'est qu'aujourd'hui, tout le monde a une caméra sur lui. Grâce au cellulaire, tout le monde est témoin. Tous les jours, images par images, vidéos par vidéos, j'étais témoin moi aussi des abus, de la violence, de l'union du peuple chilien et mapuche, de la lutte pacifique de ces chiliens fatigués et courageux, les yeux pleins d'espoir et de gaz lacrymogène.   

Les mots se sont écrits d'eux seuls, en un premier et dernier jet. J'ai vomi tous ces mots que j'ai avalés par mes yeux et que je ne pouvais qu'exprimer pendant des semaines uniquement que par mes pleurs et mes cris dans les rues de Montréal, casserole à la main. Ce montage vidéo est mon témoignage, moi chilienne née au Québec, à travers mon cellulaire, dans la distance la plus rapprochée de ceux des miens.  


Ce projet a bénéficié du soutien financier de l’École nationale de théâtre du Canada via le programme Art à part, un soutien d’urgence aux artistes de la relève pendant la période d’isolement dû au coronavirus (COVID-19).

À propos de l'artiste

Crédit photo portait de l’artiste : Olivier Hardy 
Crédit photo noir et blanc : Felipe Collado 

 

Kathy-Alexandra est une artiste d’origine chilienne qui jongle entre les arts de la scène, l’écriture, la création et l’activisme. C’est lors d’un stage au Brésil à l’été 2018 organisé par l’École supérieure de théâtre de l’UQÀM, d’où elle est diplômée, qu’elle a pu expérimenter pour la première fois de façon concrète la fusion de ses deux passions : le théâtre et la politique. Depuis sa sortie de l’école, on a pu la voir notamment aux festivals Fringe, ZH et touttout court. En octobre 2019, elle participe à la création du collectif politique Chili s’est réveillé, mouvement en soutien de la crise sociale au Chili. Que ce soit en français, espagnol, anglais, ou les trois en même temps, elle souhaite partager sa vision du monde dans tous ses questionnements et complexité par l’entremise de l’art.