Étudier en théâtre à Montréal apporte de nouvelles lumières à mes convictions féministes. Partout on se bat, on manifeste, on proteste, et on réveille les consciences.


À Montréal, le féminisme fait partie intégrante du paysage. Il est dans la conscience de la grande majorité. À Genève, par contre, le féminisme peine à s’imposer. Il a éclaté, à la vue de tous, en juin 2019, lors d’une grève. À en croire les journalistes, tout s’est passé « dans la joie et la bonne humeur ». Oui, quelques femmes bloquaient l’accès de certaines épiceries, par solidarité avec celles obligées de travailler, mais tout le monde l’a pris avec le sourire. Un peu comme s’il s’agissait bêtement d’un jeu d’enfants, qui finirait de toute façon le lendemain. Merci, chers journalistes, pour ce ton paternaliste que vous avez employé pour rapporter l’action menée, vous avez tout compris, bravo.

 

Pendant ce temps, à Montréal, on parle de générations de féministes, il y a une généalogie ; les chiffres concernant la population de femmes, en théâtre notamment, tombent. On cherche des solutions pour arriver à l’égalité, on rappelle la place des femmes, on questionne celle qu’occupent les hommes. Le chemin à parcourir reste long, ce ne sont là que des prémices, mais au regard de Genève, Montréal est loin devant.

 

Plus concrètement, en Production théâtrale : À Genève, on m’a avertie que j’entrerais dans un monde de « cowboys solitaires » et que « en tant que fille [j’allais] inévitablement attirer les regards de ces gars ». On m’a demandé quelle était ma force et ri de mes biceps 2-3 fois moins développés que ceux de la plupart des techniciens environnants.


Et puis, on se fait poser la question des enfants – « parce qu’avec des horaires pareils, ce n’est pas idéal pour s’en occuper » –, et quand bien même on assure ne pas en vouloir, l’argument est resservi, on ne vous croit pas. (Et les pères dans tout ça ????) Certaines voix s’élèvent dans ce brouhaha machiste et disent leur joie à voir la profession s’équilibrer doucement : « C’est nécessaire ! » Ouf ! Un soutien !


Outre les remarques, il y a l’absence. Les femmes, en production, sont rarement en régie, en technique, à la direction. Si vraiment on veut en voir, des femmes en théâtre, il vaut mieux aller à la billetterie, aux costumes, coiffures ou maquillages. Rassurez-vous, les consciences s’éveillent, et de plus en plus de femmes obtiennent des postes de directrices de théâtre, de plus en plus de femmes sont acceptées dans les formations de production. L’espoir est permis !

 

À Montréal, on pose presque systématiquement des questions : « Et en régie, c’est un homme ou une femme ? », « Combien de femmes ont travaillé sur cette production ? », « Combien de femmes avez-vous dans votre équipe ? » Des collectifs se mettent sur pied et se rendent visibles. Déjà en 1979, un théâtre se baptise Théâtre Expérimental des Femmes. Théâtre dédié aux spectacles féministes qui foisonnent. Théâtre géré par des femmes.


Aujourd’hui, ces textes sont toujours lus et montés, ils sont célèbres, ils courent sur toutes les lèvres, requestionnant inlassablement l’évolution de l’égalité entre hommes et femmes. En production, les quelques-uns qui se risquent à un surnom ou une remarque dégradante se font remettre à leur place franchement. On ne se tait pas, on n’est pas d’ailleurs invité.e à se taire. Une question forte demeure : à l’École, les femmes sont généralement plus nombreuses que les hommes, en Production toujours (et souvent ailleurs aussi), mais qu’en est-il dans le monde professionnel ? Les grands noms restent, même à Montréal, facilement masculins. Il serait temps d’ajouter quelques femmes au panthéon des grands noms théâtraux.


Appuyez les femmes artistes de théâtre : engagez-les, acheter des billets pour leurs spectacles, offrez-leur de la visibilité sur votre plateforme !

 

 

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