Les étudiants de la section française avant leur départ vers le festival Shaw (Interprétation 3, Mise en scène 1, Résidence indépendante, Scénographie 2, Création et Production 2 et Écriture dramatique 2 et 3)

Portrait

Le festival Shaw est méconnu au Québec. C’est pourtant l'un des plus imposants festivals de théâtre en Amérique du Nord. Son étendue étonne. Il se déroule neuf mois par année et la ville de Niagara-on-the-Lake est construite autour de cette activité théâtrale. Des autobus remplis d’amateurs de théâtre en provenance de partout du Canada et des États-Unis voisins s’entassent dans les stationnements prévus à cet effet, se trouvant à une demi-heure du centre. C’est dire l’ampleur de l’organisation.

"Shaw est une source première d’emploi. Cependant, ce qui frappe tout nouveau visiteur, c’est la sur-commercialisation ambiante"

La structure du festival en fait rêver certains: une troupe de comédiens permanents d’une cinquantaine d’acteurs et un roulement continuel de productions. Pour les artistes anglophones, Shaw est une source première d’emploi. Cependant, ce qui frappe tout nouveau visiteur, c’est la sur-commercialisation ambiante. Elle évacue le charme que le lieu pourrait autrement avoir.

En rencontrant des étudiants de l’école de théâtre torontoise George Brown, j’ai pu constater leur intérêt pour des formes originales et des sujets contemporains. Plusieurs d’entre eux déplorent le manque d’innovation et la mainmise d’un théâtre commercial ou bourgeois sur le Festival Shaw.

Aislinn Rose, directrice générale du Theater Centre, répond aux questions des étudiants


Sursauts

J’ai pu réaliser par moi-même, lors d’une représentation de Getting Married de Bernard Shaw au Royal George Theater que la misogynie y était présentée comme une petite blague, banalisée. Il y était pourtant question de battre une femme.

Même sur la question écologique, beaucoup de travail reste à faire. J’ai notamment assisté à un changement de décors (communément appelé « Change Over »), où des étudiants ont abordé la question de la récupération des matériaux. Des employés du festival admettent qu’ils n’ont pas encore trouvé de solution satisfaisante pour réutiliser et recycler les décors. Une réponse préoccupante pour notre génération aux prises avec les catastrophes climatiques.

"Il existe bien, en Ontario, des créations passées qui ont su [...] enchanter et [...] donner espoir en une relève imaginative. Reste à voir si cela pourra advenir ou non à Shaw"


Perspectives

Depuis 2017, le metteur en scène britannique Tim Carroll est à la direction artistique du Shaw. Sa nomination par le conseil d’administration avait indigné certains artistes y travaillant depuis des années, qui auraient préféré faire reconnaître et poursuivre le développement d’un théâtre proprement canadien, même si, par son aura et son expérience, Tim Carroll pourrait porter le festival Shaw sur la scène internationale, ce qui correspond parfaitement avec des objectifs d’expansion commerciale.

Pour les étudiants de George Brown, il existe bien, en Ontario, des créations passées qui ont su les enchanter et leur donner espoir en une relève imaginative. Reste à voir si cela pourra advenir ou non à Shaw.

"Il y a à Shaw un espace pour des œuvres recherchées et contemporaines. Il faut veiller à le développer."


Sex-on-the-Lake

Au festival, j’ai pu voir la pièce Sex de la célèbre Mae West au studio-théâtre Jackie Maxwell. En 1926, malgré son succès populaire, la pièce avait été interdite, après de nombreuses représentations. L’autrice était accusée, par les critiques, de corrompre la moralité des spectateurs, et accusée d'obscénité devant la justice. C’est la première fois que ce classique était remis en scène en 2019. Sex traite avec humour et intelligence de la sexualité et de la condition des femmes, des LGBTQ, des rapports existant entre l’argent, le travail, la vérité, les sentiments… La comédienne Diana Donnelly (Acting 2000) porte toute la pièce dans le rôle de l’héroïne charismatique Margy Lamont. La mise en scène use de travestissements pour mettre en valeur les jeux de genres. Les costumes à paillettes et à franges éblouissent et le décor constitué d’une montagne de valises offre une poésie de l’image et des transformations de l’espace sur quatre faces.

Il y a à Shaw un espace pour des œuvres recherchées et contemporaines. Il faut veiller à le développer.

*J’ai eu un aperçu du festival Shaw en quelques jours grâce à une donation d’Ada Slaight, également donatrice du Festival Shaw.

© portrait d'Alice par Maryanna Chan (Scénographie 2, SK)

 

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