Le 1er mai 2022, dans le cadre de la cérémonie de remise des diplômes, Frédéric Dubois, Directeur artistique de la section française et Directeur du programme d'interprétation a livré un discours tout en émotion.

Chers élèves de la section française,

Pourquoi dans ces temps troubles partir sur les chemins du monde et faire du théâtre ?
Parce qu’il faudra raconter.

Nous vous avons vu aller et dans le délire des jours d’aujourd’hui, nous savons que vous êtes de ceux et celles qui lèvent la main,
De ceux et celles qui la posent sur une feuille ou sur un clavier, geste brave s’il en est un,
De ceux et celles qui la tendent vers les autres, la main, ceux et celles qui donnent et prennent le relais dans la course.

Et parce que vous êtes fait de cette fibre-là, vous avez tout ce qu’il faut pour remplir à bien cette mission au milieu du chaos.
Dire. Raconter. Nommer.
Ce monde est inconfortable. Déréglé.
Il vous faudra donc être parfaitement inconfortable et intelligemment en marge pour que vous puissiez devenir complètement ce que vous voulez être et prendre la parole. La vôtre.

Merci pour vos images, vos couleurs, la vérité de vos corps en mouvement dans des espaces enrobant, merci pour le bleu, le blanc, le rouge, les bords de routes, les crémeries remplies de vermines, les tenues folles, les voix, celles qui cherchent un corps, les longs sofas, les courses de jogging, les villes qui disparaissent, les expositions, projets centraux, pour vos questions, vos doutes et certitudes.


Ma classe inter 2022.

Y a de ces fêtes et rassemblements où soudainement, tout le monde se met à rire en même temps, pris d’une euphorie grisante et peut-être éternelle.
Y a de ces fêtes et rassemblements où, au contraire, tout vit doucement dans les regards éparpillés et alors, le plaisir se savoure à petite dose.

J’aime les grandes fêtes qui explosent.
J’aime aussi les rassemblements qui murmurent.
Et pendant trois ans à vos côtés, j’ai l’impression d’avoir été convié parfois à l’un, parfois à l’autre.
C’est pour ça que j’ai aimé vous voir aller.
Avec tout ce que ça a voulu dire de rendez-vous complexes et de fulgurances mémorables. Même en étant Agamemnon en zoom, quelque chose a eu lieu. C’est tout dire.

Je vous souhaite pour la suite du monde de vous connecter sur ce qui vous échappe. C’est votre quête partagée. À cause et malgré vous.

C’est toujours là, du reste, que vous avez été les hôtes de la fête les plus inspirants.
Je vous le jure, je l’ai vu.

C’est peut-être qui sait parce qu’être hôtes, c’est à la fois recevoir et être reçu.
Et que vous êtes magnifiques quand vous êtes sur cette frontière imprécise.

De toute façon, ce qui compte, c’est qu’il y a eu la fête et le rassemblement.
Partez d’ici ensemble ou pas, mais je vous le jure qu’à jamais, vous porterez en chacun de vous :

Le cœur au ventre du gamin effronté qu’est Francis
L’invention et le feu en réserve de Charlie
La droiture et l’excès tranquille d’Ismaïl
Le tremblement de toutes les terres d’Émile
L’engagement bouillant et la vaillance d’Alexis
La fougue et la conviction batailleuse de Constance
La fantaisie authentique du cœur de Caroline
Les sublimes exaltations de la joie de David
Le grand rire plein d’ardeur de Ludovic
Les élégances infinies de la Vérité d’Anna.

En tout cas, moi, je mets un peu de tout ça dans ma poche.
Parce que vous avez fait de moi, de notre programme, de cette école, quelque chose de meilleur.
Soyez outillés de vous, des autres et du monde.
Vous irez loin.
Je l’espère.

Prenez soin de vous.
Prenez soin de vos cœurs
Faites tomber des murs
Faites la fête
Conviez tout le monde.
Sans peur et sans jugements.
Il devrait se passer de quoi.