Cela a commencé par une rencontre, celle de Pascale, durant ma première année à l’École nationale de théâtre, dans son cours Parler du monde en parlant de soi.
Avec sa grande bienveillance, Pascale m’a poussée « à aller au bout des choses » (comme nous nous amusons à répéter encore aujourd’hui), à aller au bout des envies, des craintes, même des colères. Cela a continué avec un défi, celui de Robert, à s’essayer à la création « d’un coup que t’aimes ça », disait-il.
Cela s’est poursuivi avec la sensibilité d’Andréane, son écoute empathique, ses questionnements sensibles stimulants. Cela s’est articulé graduellement autour d’une table, au fil d’un printemps puis d’un été avec Pascale et Andréane.
Cela a été bouleversé par la rencontre artistique de Aida, Rasha, Tina et Houda, par leurs parcours de vie et d’artistes, leurs intelligences, leurs sensibilités.
Cela a pris forme, s’est déformé puis transformé, en salle de répétition, avec des expérimentations, des improvisations, des essais et des trouvailles magiques trois minutes avant la fin d’une répétition ; des larmes, des rires et des larmes de fous rires, le tout avec l’accompagnement empli de douceur et d’esprit de Marie-Christine.
Cela est devenu spectacle à l’aide d’une formidable équipe de gestion et de conception : Marie-Ève, Agusta, Marguerite M., Gaëlle Courcier, Marguerite H., Steph, Amy, sans oublier le reste de l’équipe technique et de direction de l’école.
Je ne suis pas peu fière de vous présenter fatmas, un spectacle qui met en jeu une question qui m’a rongée durant mes 17 ans de vie au Québec, celle d’un certain regard porté, en Occident, sur les femmes arabes et/ou musulmanes.
Ce regard est tantôt fasciné, tantôt dégoûté, mais toujours dénué d’humanité.
fatmas est une tentative de tracer ce regard jusqu’à sa source coloniale et de l’explorer dans ses innommables dérives. fatmas est une tentative de parole au-delà de ce regard. fatmas est une lettre d’amour à ma mère, mes tantes, mes cousines et mes amies ; une lettre d’amour aux résistantes du passé et du présent, ici et ailleurs, surtout ailleurs, là où survivre est une rude tâche.
fatmas est un acte d’amour et de communauté que je me permets de commettre avec vous le temps d’une représentation.
Faiza Maskhouni